• Ce Katana est un FUDOSHIN - Aka Practical Damas K47.

    Lame tranchante forgée DAMAS de 69 cm. Longueur totale de 103 cm.

    Le manche tressée en bordeau à la poignée en peau de raie avec un Tsuba en acier décoré. 

     

    Le Tanto est de la même fabrication... et donc qualité ! T71

    Lame 24 cm tranchante en acier DAMAS forgé à la main.
    Dureté de 60 Hrc sur le fil et de 40 Hrc sur le dos de la lame
     
    Longueur totale 38,5 cm et dans son fourreau 43 cm

     

    La fabrication et la structure d'un Katana :

    Et maintenant un peu d'histoire....... :

    Le sabre est l’âme du samouraï, le destin de celui-ci est intimement lié à celui de son arme. Un Katana se doit d’être le plus tranchant possible et beaucoup de forgerons se sont essayés à forger la lame parfaite à travers l’histoire, forgée dans le sang, du Japon médiéval. On peut donc distinguer sur les lames les différences parfois subtiles qui caractérisent chaque époque ou chaque région.

     

     

    Ce dossier commence à partir de l’an mille. En effet, c'est aux environs de cette date que les caractéristiques fondamentales du Katana (appelé aussi Nippon-to) apparaissent. De plus, les lames antérieures à cette date sont rarissimes et hors de portée de l'immense majorité des collectionneurs, les quelques exemples qui sont parvenus jusqu'à nous résident principalement dans des musées au Japon. Il s'agissait d'épées droites, à deux tranchants, que l'on nomme Ken.

    Xème - XIIème - Milieu de l'ère Heian - Début de l'ère Kamakura

    À cette époque, le samouraï (alors appelé Bushi) combat principalement à cheval, le plus souvent en combat singulier. Les lames des sabres sont longues (80 cm et plus). La partie supérieure, vers la pointe, est amincie pour alléger la lame. Le Shinogi (l'arrête sur les côtés) est haut placé et la courbure plus prononcée vers la Tsuba(la garde du sabre). Ce grand sabre, appelé Tachi, se porte suspendu à la ceinture, le tranchant vers le sol. La trempe est droite et étroite et le forgeron recherche la solidité, la beauté des lames n'étant pas une priorité pour l’époque. Mais la qualité des lames passe par un bon acier, bien forgé et bien trempé ; très vite les forgerons et le bushi se rendent compte que les meilleures lames au combat sont aussi les plus belles. Vers la fin de l'ère Kamakura, les lignes de trempe commencent à onduler légèrement (courbure) et la valeur artistique des lames commence à être reconnue.

    XIIIème - Milieu de l'ère Kamakura

    Pour la première fois, les nobles sont chassés du pouvoir par les samouraïs et les seigneurs de guerre se querellent pour le contrôle des châteaux. Les Tachi de l'époque précédente ont entraîné la fabrication d’armures plus lourdes et plus robustes. Pour venir à bout de ces armures, le sabre devient plus épais et plus lourd et on réduit la différence de largeur entre la base et la pointe. La courbure est remontée vers le milieu et la pointe est trapue et courte.

    L'élégante silhouette des sabres précédents laisse la place à des lames plus grosses et plus robustes mais le maniement de ces lourds sabres demande une grande force et la technique de combat à deux mains se généralise. La technique de forge a fait des progrès considérables. Les styles de chaque atelier sont bien distincts suivant les régions ainsi que les techniques et le minerai utilisé. De très grands artistes font leur apparition et fournissent un travail parfait, c’est l’âge d’or du sabre japonais. 

    Fin de l'ère Kamakura

    En 1274 et 1280, les Mongols de Kubilai Khan essayent d'envahir le Japon par deux fois. Les seigneurs japonais, divisés par leur lutte pour le pouvoir, sont presque vaincus mais par deux fois, les Kamikaze (vents divins) engloutissent les flottes d'invasion Mongoles. Ces combats changèrent beaucoup de choses, alors que les samouraïs combattaient d'homme à homme dans d'homériques duels, avec leurs lourdes armures, les Mongols, sans protection épaisse, combattaient en groupe et n'hésitaient pas à encercler un samouraï isolé pour le vaincre.

    Cette nouvelle tactique de combat modifie la conception des armures. Le sabre voit sa partie supérieure amincie de nouveau et sa pointe est rallongée et affinée. La trempe s’assagit par la même occasion. Grâce aux typhons, les Mongols sont défaits après des combats acharnés.
    Mais le gouvernement Kamakura oublie de récompenser les samouraïs qui ont vaillamment combattu l’envahisseur… Révoltés, les samouraïs font tomber le gouvernement !

    XIVème - Ere Nambokucho

    L'empereur Godaigo est lui aussi en de bien mauvais termes avec les grands samouraïs, la révolte est inévitable et un prince provoque la division de la famille impériale. Le pays est plongé dans la guerre civile. Les deux clans lèvent chacun de grandes armées et les combats de groupe (comme lors de l’invasion mongole) deviennent monnaie courante. Les soldats à pied, équipés d'arme d'hast, le Yari (javelot ou lance) et la Naginata (hallebarde dont la pointe ressemble à un sabre), prennent de l'importance et pour se démarquer de la piétaille, les ornements de l'armure s’agrandissent.

    Le sabre devient gigantesque, large avec une pointe longue, la courbure est très prononcée. Pour que le poids reste raisonnable, la lame s'affine. Très impressionnant mais peu pratique, un second sabre plus petit fait son apparition : le Katana (glissé dans la ceinture, le tranchant vers le ciel). Les techniques de forge sont bien maîtrisées et l'artiste Masamune est à son apogée. Ses techniques influencent le Japon tout entier.

    XVème - XVIème - Ere Muromachi

    Après les longues guerres de Nanbokucho, la paix voit la disparition des très longs sabres jugés trop encombrants. Le second sabre, le Katana, plus petit et plus pratique commence à remplacer le Tachi. Les lames de cette époque sont plus courtes et moins larges, avec une pointe plus ramassée, et voient leur épaisseur augmenter pour compenser la robustesse, de très belles lames seront forgées durant cette période. Les armures aussi deviennent plus simples, mais vers la fin de l’époque Muromachi, les troubles reprennent car les intrigues sont nombreuses et le pouvoir change souvent de mains.

    La demande en sabres est énorme et les ateliers sont débordés. Le très grand nombre de sabres produits permet aux forgerons d'essayer de nombreuses choses, mais globalement, la valeur artistique est laissée de côté au profit du nombre. Il subsiste quand même des commandes spéciales de samouraïs et les excellentes lames sont toujours fabriquées. La plupart des lames forgées sont des Katanas, pas trop grands, bien adaptés aux combats soudains de civils ambitieux…

    Fin XVIème - Début XVIIème - Ere Momoyama

    À ce moment, les Portugais introduisent les premières armes à feu. Rudimentaires et imprécises, elles conduisirent quand même à renforcer l'armure, souvent par une tôle de fer forgé sur le torse. Un grand seigneur et son allié, Oda Nobunaga et Toyotomi Hideyoshi, mettent fin à l'anarchie et réunifient le Japon. Le calme qui suit et la découverte d'importantes mines d'or enrichissent le pays tout entier. Les montures des sabres deviennent donc richement décorées (dorures, gravures, etc.).
    Les anciennes lames de Nambokucho, très voyantes, restent très appréciées. Cependant, trop longues, elles sont raccourcies et équipées de montures à la mode. L'or et les alliages de métaux précieux sont très employés pour la décoration des Tsubas et des fourreaux. Ces anciennes lames, ainsi remontées, sont tellement appréciées que les forgerons produisent des lames qui imitent la silhouette caractéristique des anciennes lames raccourcies (un peu trop larges par rapport à leur taille, mais très courbes avec une grosse pointe dont la seule différence est l'épaisseur). Les longues lames anciennes raccourcies restent minces, bien évidemment, alors que les nouvelles sont plus épaisses. Les trempes redeviennent vives et voyantes.

    C'est à cette époque que le nouveau shogun, Hideyoshi prend une mesure anti-émeute préventive et ordonne une chasse aux sabres. A cette époque tout le monde était armé - paysans, marchands, artisans - mais avec la nouvelle loi, seuls les samouraïs pouvaient porter le sabre. Il en résulte que toutes les lames forgées pendant les temps de guerre et produites en grande quantité (donc sans grande valeur artistique) sont détruites. Cette sélection naturelle, ainsi que l'utilisation importante des métaux précieux dans les montures, a fait de l’époque Momoyama la grande époque Momoyama.

    XVIIème - Milieu XVIIIème - Début et milieu de l'ère Edo

    Après la mort d'Hideyoshi, le nouveau shogun Ieyasu Tokugawa extermine la famille de son prédécesseur, puis il réorganise toute la répartition des grandes familles et des domaines dans le but d'asseoir son pouvoir. Chaque seigneur qui est déplacé part avec sa cour, et bien sûr, ses forgerons ! Il s'ensuit une complète refonte des ateliers et des styles, jusque là bien séparés. Les voies de communications et les matériaux importés augmentent encore ce renouveau. C'est la fin des sabres Ko-to ou anciens sabres.

    A partir de ce moment, les nouveaux sabres sont appelés Shin-to (nouveau sabre). Les techniques d'escrime très sophistiquées, incluant les coups de taille et d'estoc, conduisent à de nouveaux types de lame. Une taille raisonnable, une moindre courbure, une partie supérieure mince et une pointe assez petite, voilà la forme du nouveau sabre japonais. Deux grands centres cohabitent à cette époque : Edo, capitale politique, martiale et stricte, et Osaka, centre du commerce, moins austère. On commence à discerner deux genres de lames et montures.

    A Edo, les lames sobres et martiales. A Osaka, des lames plus voyantes, des trempes très travaillées ainsi que des grains d'acier très fins. Les riches marchands, qui ont droit au sabre court, dépensent des fortunes dans des lames et des montures très riches. Les samouraïs, eux, s'ennuient par ces temps de paix et les duels pour des prétextes futiles sont monnaie courante. La paix durant, la demande de sabres se fait moins forte et on privilégie la beauté et la richesse plutôt que l'aspect martial du sabre.

    Fin XVIIIème - Milieu XIXème - Fin de l'ère Edo

    Le gouvernement Tokugawa est à bout de souffle. Les samouraïs, désœuvrés depuis trop longtemps, montrent leur mécontentement. De plus, la ruine les guette. Les marchands ont acquis le pouvoir financier, la révolte gronde… Le mouvement révolutionnaire souhaite rendre le pouvoir à l'empereur. Nous sommes en 1853 et le commodore Perry est aux portes du Japon avec sa flotte. Les perspectives d’un conflit de grande envergure réveillent l’industrie du sabre et les forgerons réessayent de fabriquer des lames comparables à celles de leurs glorieux ancêtres. D'autres imaginent des lames nouvelles en combinant diverses caractéristiques. Ce renouveau conduit aux sabres Shin shin-to (nouveau nouveau sabre).

    La production est très diverse, puisque tous les forgerons peuvent se procurer de l'acier brut (Tamahagane) prêt à être utilisé, on ne voit plus les différences dans le grain de l'acier qui caractérisaient les anciens ateliers. Seules restent les différences de techniques, de cuissons, de trempes. Les lames de cette époque ont une apparence très claire, pure et brillante, mais les subtilités des anciennes lames ont disparu.

    Milieu XIXème à nos jours - Ere Meiji

    En 1867, avec la chute des Tokugawa, la classe samouraï est abolie. La demande en sabres est en chute libre et le coup de grâce est donné en 1876 avec l'interdiction du port du sabre dans la rue. A partir de là, le sabre n'évoluera plus pour des raisons pratiques. Puis vient la Seconde Guerre mondiale. Les lames produites pour l'armée sont usinées à partir de barres d'acier industriel et n'entrent pas dans le prestigieux groupe nippon-to. Après la défaite du Japon, l'armée US a d'abord voulu confisquer tous les sabres pour les détruire... Mais les Japonais ont fait le maximum pour faire admettre à l'occupant la valeur historique, sociale, et parfois religieuse incarnée par le sabre.

    Mais en 1947, le Japon est contraint de classifier les sabres religieux ou historiques et de détruire les autres sabres. La création de la NTBHK (association pour la sauvegarde du sabre d'art) sauve de la destruction de nombreuses lames anciennes et surtout les techniques si complexes de forge. Aujourd'hui, elle organise des concours de forge et décerne des prix aux artistes de valeur. Quelques forgerons ont le titre de trésor national vivant et forgent des lames qui égalent presque les prestigieuses lames de leurs ancêtres...

    Fabrication de la lame

    Le sabre japonais ne doit ni se casser ni se tordre et garder son tranchant. Il doit donc être très dur et en même temps suffisamment souple. En métallurgie, ces propriétés sont contraires. Les anciens forgerons ont donc imaginé et mis au point un processus très complexe pour aboutir à une lame quasiment parfaite. Tout commence avec la production d'acier brut appelé Tamahagane. Le processus pour obtenir cet acier est unique au monde. Le minerai, déjà soigneusement choisi, est fondu avec un mélange de sable ferrugineux et de charbon de bois.

    Ici interviennent les secrets des maîtres forgerons, avec pour chaque atelier des différences dans la manière. Ce qui est commun à tous, en revanche, c'est l'énorme travail nécessaire pour obtenir de quoi forger une lame. En effet, seul un infime pourcentage de minerai sera transformé en acier brut. On estime entre 1% et 10% au maximum du poids de départ du minerai ! Déjà, à ce niveau se dégage l'excellence du matériau. Les morceaux de métal ainsi produits sont cassés en petits bouts de 3 à 5 cm que le forgeron triera suivant la teneur en carbone et donc, la dureté qu'il estime en chaque morceau.

    Ensuite, il réunit le tout en un bloc de la forme d'une brique, puis le chauffe sur un feu de charbon de bois. A bonne température, le forgeron les aplatit avec un marteau en un bloc compact puis le trempe dans l'eau et recasse le tout en petits morceaux. Cette opération peut être répétée plusieurs fois. Ensuite, quand le forgeron estime sa brique de métal prête, il la chauffe et la forge sur l'enclume en pliant son métal de nombreuses fois.

    Ce processus de forge et de pliage successifs permet à l'acier de se débarrasser de ces impuretés, tout en uniformisant sa teneur en carbone. Bien sûr, chaque atelier a sa manière de forger et plier le métal. Ce travail sera visible plus tard sur la lame avec ce que l'on nomme le grain de l'acier. Chaque fois que le métal est plié, cela double les couches d'acier. On arrive donc assez vite à un nombre très important. Il existe une limite au nombre de pliages souhaitables, car après l'acier perd en dureté. Là encore, chaque maître a son secret. Pour répondre aux critères de dureté et de souplesse, le sabre est fait d'acier composite.

    Le tranchant et l'extérieur sont faits d'acier très dur, alors que le cœur et le dos sont faits d'acier plus doux. Lorsque le forgeron est en possession des deux qualités d'acier qu'il souhaite, le but est d'enrober l'acier doux de la couche plus dure. Là encore, les méthodes pour réussir cet amalgame peuvent varier suivant les artisans. Une fois la forme de la lame obtenue, on arrive au stade de la cuisson et de la trempe. Ce travail est très délicat. Là aussi, il faut veiller à ce que le tranchant soit plus dur que le reste de la lame. Pour cela, la lame est recouverte d'un mélange d'argile, de poudre de charbon de bois et de petits secrets de chacun...

    Ce travail fini, on chauffe la lame sur un feu de charbon de bois et quand le forgeron estime la bonne température atteinte, il plonge la lame dans l'eau. Le tranchant, moins protégé par une mince couche d'argile, se refroidit plus vite que le reste de la lame et acquiert sa dureté définitive. Entre les deux parties de la lame, apparaît bien visible la ligne de trempe. Sur la partie la plus trempée, le choc thermique transforme l'acier en une structure appelée martensite. Il s'agit de fins cristaux extrêmement durs qui expliquent le redoutable tranchant des Nippon-tô.

    Le choc thermique étant différent sur la lame, celle-ci se courbe. Suivant le résultat que le forgeron veut obtenir, il peut retoucher légèrement la courbure. Puis la lame est grossièrement polie pour lui donner sa forme définitive. A ce stade, si le maître est satisfait du résultat, il donnera la lame au polisseur qui finira le sabre. On le voit, la forge d'un sabre japonais n'est pas une mince affaire. Les occasions de rater le sabre ne manquent pas. C'est pourquoi les belles lames ne naissent pas très nombreuses. Même les meilleurs forgerons peuvent rater une lame. Aujourd'hui encore, avec les connaissances actuelles de la métallurgie, les grands maîtres du passé sont rarement égalés.

    Polissage

    Après la forge, vient l'étape du polissage. Cette opération, d'une grande difficulté, est bien plus importante que polir simplement une pièce de métal. Pour un sabre japonais, le polissage signifie non seulement le tranchant du sabre, mais implique aussi une notion d'embellissement de la lame. En effet, c'est grâce au polisseur que le travail du métal réalisé dans les forges sera visible. C'est une étape cruciale.

    Au Japon, l'apprentissage du métier de polisseur demande une dizaine d'années d'un dur labeur. Pourquoi si long ? Le polisseur doit avant tout être un expert en sabres et sa responsabilité est énorme. Imaginons que vous possédiez une lame de l'époque Kamakura. Si un polisseur amateur commettait la grave erreur d'amincir cette lame comme un sabre fin Edo, la valeur serait bel et bien ruinée. Lors d'une expertise, la lame serait considérée comme fausse, et de plus un objet historique serait définitivement défiguré. Voilà pourquoi le polisseur doit être un expert du kantei (expertise). Il doit au maximum respecter la lame telle que le forgeron l'a faite et pas seulement la polir.

    Le polissage est effectué avec des pierres d'origine volcanique typiquement japonaises, bien que, de nos jours, des pierres industrielles remplacent souvent les pierres naturelles. En général une dizaine de pierres sont utilisées. Chacune de plus en plus fine jusqu'aux petites pierres de finition. Il existe deux grandes techniques de polissage. La première laisse plus de place au naturel de la lame. L'autre, plus récente et popularisée par la famille Hon Ami, insiste plus sur les contrastes du métal. C'est surtout une affaire de goût et aujourd'hui les deux techniques cohabitent. Pour les collectionneurs occidentaux, le polissage est un véritable casse-tête. Que faire de sa lame ? A qui la confier ? Les polisseurs compétents hors du Japon se comptent sur les doigts de la main… Bien sûr, le prix est souvent un second problème. Pourtant, pour une lame de qualité, la seule option valable est d'envoyer le sabre au Japon. Cela demandera entre trois et six mois, mais avec la garantie d’un bon travail effectué.

    Les preuves

    Tout le monde a entendu parler des samouraïs coupant, tailladant allègrement bras, jambes, têtes et armures, mais qu'en est-il vraiment ? Il existe des documents écrits précis qui décrivent le tameshi-giri (la coupe), certains faisant état de tests depuis l'ère Kamakura (XIIIème - XIVème siècles). Les plus nombreux ont été écrits à l'ère Edo. Il faut dire que les guerres incessantes du moyen âge devaient remplacer avantageusement les tests. Les tests de coupe étaient pratiqués par des spécialistes, les samouraïs faisant tester leur nouvelle lame par les "coupeurs" officiels, et parfois même celles qui étaient dans la famille depuis plusieurs générations.

    Les essais étaient très codifiés et ont été décrits précisément par les auteurs de l'époque. La plupart du temps, des condamnés à mort étaient "recyclés" dans ce but. Le corps était attaché sur le Dodan, chaque partie du corps étant répertoriée suivant la difficulté de la coupe. Bien sûr, les parties les plus difficiles comme les épaules ou les hanches étaient les plus prisées. Chaque coupe était notée et le sabre soigneusement inspecté par l'assemblée : le testeur et le propriétaire, bien sûr, mais aussi les témoins. Le résultat des tests était le plus souvent gravé sur la soie du sabre.

    On trouve de nos jours des sabres mentionnant des résultats ahurissants ! Trois corps "proprement" fendus n'est pas une rareté. Le record en la matière date de 1681 lorsqu'une lame forgée par Seki Kanefusa fut créditée de sept corps superposés !!! Quelle que soit la force et la technique de Nakanishi (l'essayeur), ce genre de record n'était rendu possible qu'avec l'emploi d'une tsuba spéciale, construite en plomb, destinée à alourdir le sabre et augmenter la force du coup. Cependant, même avec plusieurs kilos de tsuba, cela reste hors de portée d'un vulgaire couteau de cuisine ! Tout cela est relaté dans des ouvrages tels que le Tameshigiri Densho, écrit à l'époque Edo.

    Parfois aussi les forgerons eux- même voulaient tester leur lame ; je laisse le lecteur seul juge... Voici un petit exemple. Nous sommes le 24 mars de la 6° année de l’ère Kaei (1853), au château de Matsushiro, chez Kaneko Chubei. Étaient présents 18 samouraïs qui ont tous participé à l'essai. La lame a été forgée par Yamaura Saneo, fameux forgeron. Voici le détail des essais :

    - Botte de paille : 11 coupes
    - Botte de paille renfermant une tige de bambou : 6 coupes
    - Lame de fer de 3 mm d'épaisseur et 2,1 cm de largeur : sectionnée d'un coup! (petite fissure à la trempe)
    - Corne de cerf : 6 coupes
    - Botte de paille renfermant une tige de bambou : 2 coupes (petit éclat à la trempe)
    - Casque léger en laque garni de sable et de morceaux de fer, 1,5 cm d'épaisseur : 2 coupes
    - Armure en fer : 2 coupes
    - Tsuba en alliage de 4mm d'épaisseur : 3 coupes
    - Acier brut : 1 coupe
    - Casque de guerre : 1 coupe (la lame s'est un peu tordue)
    - 7 coups assénés sur le dos de la lame avec un bâton de fer
    - 6 coups assénés de chaque coté de la lame avec un bâton de fer
    - 6 coups assénés sur le dos de la lame avec une enclume de fer
    - 7 coups assénés sur le dos, puis trois de chaque côté de la lame avec l'enclume de fer

    Après cette dernière agression, la lame s'est cassée en deux... Le forgeron, Yamaura Saneo, prenant son travail très à cœur, des témoins ont rapporté que sous son habit de travail, il portait le kimono blanc du suicide rituel (seppuku), au cas où sa lame se serait mal comportée lors de ce torture-test. Inutile de préciser que le samouraï qui possédait une telle lame se sentait honoré et fier de son sabre.

    Plus tard, à l'époque Meiji (XIXème), 4 samouraïs s'affrontèrent devant l'empereur pour tenter de couper un casque de guerre. A première vue, les chances de fendre un casque lourd, construit selon les mêmes principes que le sabre, sont pratiquement nulles. Pourtant, l'un d'eux réussit l'exploit de fendre le casque sur 10 cm de long et 2 cm de profondeur ! Aucune lame moderne, usinée mécaniquement, ne pourrait venir à bout d'un tel casque. Voilà pourquoi, dans l'ancien Japon, les grandes lames étaient très recherchées. De tels exemples, ajoutés à la beauté de ces sabres et de leurs montures, expliquent qu'aujourd'hui encore, certaines de ces lames n'ont pas de prix.

    Aujourd'hui

    Avec l'interdiction du port du sabre dans la rue initiée en 1876 à l'ère Meiji, la grande tradition du sabre utilitaire et social a pris fin. Pour la plupart, les forgerons sans commande à honorer se sont reconvertis dans la forge d'outils. Les artistes vieillissant, les grandes traditions ont bien failli se perdre. La Seconde Guerre mondiale a vu une production massive de sabres pour l'armée, mais comme vous le savez, ces sabres ont été usinés dans des barres d'acier et ne sont en aucun cas comparables aux Nippon-to. Parfois, ces lames ont été finies à la main par des polisseurs, mais ne peuvent que ressembler aux anciennes lames.

    A la fin de la guerre, les traditions et les techniques de forge étaient vraiment en danger d'extinction. Heureusement, les efforts d'un petit groupe de Japonais réussirent à faire admettre à l'armée américaine la valeur du sabre, bien plus importante qu'une simple arme, qui, il faut bien l'admettre, avait perdu en utilité au XXe siècle. Après guerre, la création de la NTBHK a permis de transmettre et d'encourager la pratique de la forge traditionnelle. Grâce à ce nouveau climat, des artisans ont repris l'étude des techniques anciennes dans tous les domaines du sabre et de ses montures.

    Après des débuts difficiles, les forgerons actuels arrivent à forger des lames d'une grande beauté. Malheureusement, ces lames ont deux principaux défauts aux yeux des collectionneurs. Premièrement, il leur manque ce parfum d'histoire qui embaume les lames anciennes. Le second vient du fait que les lames n'étant plus utilisées en combat, les forgerons se concentrent sur l'aspect esthétique des lames et oublient parfois l'aspect fonctionnel. Les puristes disent parfois que l'art du sabre s'est éteint avec la restauration de l'empereur Meiji et la dissolution de la classe samouraï mais ce point de vue est un peu exagéré.

    Il existe aujourd'hui des artistes de grand talent. Certains ont même le titre de trésor national vivant. Incontestablement, ces artisans forgent des lames magnifiques, parfaitement dignes d'être collectionnées. Et rien n'empêche l'acquéreur de leur faire subir un torture-test du genre de celui décrit précédemment ! Plaisanterie mise à part, il existe bel et bien de belles lames forgées au XXe siècle. Ces superbes sabres, appelés Shinsakuto, sont, pour certains, de pures merveilles. Forgés par les meilleurs artisans du Japon, ils égalent parfois les sabres de la grande époque Koto ! De plus, ils n'ont pas subit les atteintes du temps et leur beauté n'a d'égale que leur redoutable tranchant.

    Pour la plupart, ces lames sont produites sur commande pour le marché japonais des collectionneurs ou des arts martiaux. La quantité produite est limitée, pour assurer une grande qualité, le gouvernement japonais n'autorise que deux lames par mois, et par forgeron. De ce fait, seules les lames parfaites verront le jour. Toutes celles présentant un défaut lors de la forge seront impitoyablement détruites. Cette disposition légale fait le bonheur de tous les passionnés de Katanas dans le monde. Que l'on soit collectionneur ou pratiquant, posséder un tel sabre est vraiment une chance.

    L'autre partie de la production de ces shinsakuto est réalisée lors de compétition de forge organisé par la NTBHK. Chaque année, les meilleurs forgerons rivalisent d'adresse pour forger dans un temps donné et à partir d'une même quantité de tamahagane, les meilleures lames possibles. A la fin de la manifestation, un collège d'experts de l'organisation décerne les prix aux forgerons les plus habiles. Les lames les plus réussies seront généralement confiées au polisseur, puis aux divers artisans qui leur confectionneront leurs montures, avant d'être mises en vente. Parfois, cela peut être l'occasion d'acquérir un beau sabre moins cher que s'il avait été commandé expressément.

    Grâce aux shinsakuto et à l'étude des sabres antiques, la culture millénaire du sabre japonais se perpétue aujourd'hui dans des séminaires d'expertise. Les participants examinent des lames et essayent de déterminer l'époque, l'atelier ou l'école, et même le forgeron. Tout comme des siècles avant eux, où les seigneurs de guerre admiraient et évaluaient les sabres en leur possession. Seule la motivation a changé, mais la grande tradition du sabre japonais est ainsi perpétuée.


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